Le  narrateur  rencontre dans un bus un jeune homme au long cou, coiffé  d'un chapeau orné d'une tresse  tenant lieu de ruban. Ce jeune homme  échange quelques mots assez vifs avec un  autre voyageur, puis va  s'asseoir à une place devenue libre. Un peu plus tard,  le narrateur  revoit ce jeune homme qui est maintenant en train de discuter  avec un  ami. Celui-ci lui conseille de faire remonter le bouton supérieur de son  pardessus.
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L'arc-en-ciel
Un  jour, je me trouvai sur la plate-forme d'un autobus violet. Il y avait   là un jeune homme assez ridicule : cou indigo, cordelière au chapeau.  Tout  d'un coup, il proteste contre un monsieur bleu. Il lui reproche  notamment, d'une  voix verte, de le bousculer chaque fois qu'il descend  des gens. Ceci dit, il  se précipite, vers une place jaune, pour s'y  asseoir. Deux heures plus  tard, je le rencontre devant une gare  orangée. Il est avec un ami qui lui conseille  de faire ajouter un  bouton à son pardessus rouge.
Lettre  officielle
J'ai  l'honneur de vous informer des faits suivants dont j'ai pu être le témoin aussi impartial qu'horrifié. 
Ce jour même, aux environs de midi, je me trouvais sur la plate-forme   d'un autobus qui remontait la rue de Courcelles en direction de la place   Champerret. Ledit autobus Était complet, plus que complet même,  oserai-je dire, car  le receveur avait pris en surcharge plusieurs  impétrants, sans raison  valable et mû par une bonté d'âme exagérée qui  le faisait passer outre aux  règlements et qui, par suite, frisait  l'indulgence. À chaque arrêt, les allées et  venues des voyageurs  descendants et montants ne manquaient pas de provoquer une  certaine  bousculade qui incita l'un de ces voyageurs à protester, mais non sans   timidité. Je dois dire qu'il alla s'asseoir dès que la chose fut  possible. 
J'ajouterai à ce bref récit cet addendum : j'eus l'occasion d'apercevoir   ce voyageur quelque temps après en compagnie d'un personnage que je  n'ai pu identifier. La conversation qu'ils échangeaient avec animation  semblait  avoir trait à des questions de nature esthétique. Étant  données ces  conditions, je vous prie de vouloir bien, monsieur,  m'indiquer les conséquences que je  dois tirer de ces faits et  l'attitude qu'ensuite il vous semblera bon que je  prenne dans la  conduite de ma vie subséquente.  Dans l'attente de votre  réponse, je  vous assure, monsieur, de ma parfaite considération empressée au moins.
Imparfait
C'était  midi. Les voyageurs montaient dans l'autobus. On était serré. Un jeune   monsieur portait sur sa tête un chapeau qui était entouré d'une tresse  et non  d'un ruban. Il avait un long cou. Il se plaignait auprès de son  voisin des bousculades que ce dernier lui infligeait. Dès qu'il  apercevait une  place libre, il se précipitait vers elle et s'y  asseyait. 
Je   l'apercevais plus tard, devant la gare Saint-Lazare. Il se vêtait d'un  pardessus et un  camarade qui se trouvait là lui faisait cette remarque  : il fallait mettre un  bouton supplémentaire.
Botanique
Après  avoir fait le poireau sous un tournesol merveilleusement épanoui je me   greffai sur une citrouille en route vers le champ Perret. Là je déterre  une  courge dont la tige était montée en graine et le citron surmonté  d'une capsule  entourée d'une liane. Ce cornichon se met à enguirlander  un navet qui piétinait ses plates-bandes et lui écrasait ses oignons.  Mais, des dattes ! fuyant une récolte de châtaignes et de marrons, il  alla se planter en un terrain  vierge. 
Plus tard je le revis devant la serre des banlieusards. Il envisageait  une bouture de pois chiche en haut de sa corolle.
Zoologique
Dans  la volière qui, à l'heure où les lions vont boire, nous emmenait vers  la  place Champerret j'aperçus un zèbre au cou d'autruche qui portait un  castor  entouré d'un mille-pattes. Soudain, le girafeau se mit à  enrager sous prétexte  qu'une bestiole voisine lui écrasait les sabots.  Mais pour éviter de se faire  secouer les puces il cavala vers un  terrier abandonné. Je le revis plus tard  devant le jardin  d'acclimatation Plus tard, devant le Jardin d'Acclimation, je  revis le  poulet en train de pépier avec un zoziau à propos de son plumage.
Exercice proposé
Dans  un  restaurant, à une table voisine, un couple, formé d’un homme vêtu  d’un veston taché, et  d’une femme avec une épaisse tignasse rousse,  discute fermement. Après  quelques minutes, la femme se lève et jette  son verre à la figure de l’homme.  Elle sort du restaurant en pleurant.  L’homme la suit en courant.
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